"La mort est à l'opposé de la beauté. On vit dans cet univers, j'ai envie de le décrire : théâtre, poésie, nouvelles, romans littéraires comme on dit, ou polars, peu importe… J'aime tous les genres, toutes les formes d'expression."
Mes étés d’écrivains (Belfond, 2003)
Auteur d'une œuvre visuelle personnelle
Pierre Bourgeade développe depuis longtemps - avant 1970 - une œuvre visuelle personnelle faite de photographies (photomontages, xérographies, polaroïds) et de dessins. Pierre Belfond fera aussi l’acquisition de certains de ces dessins.[1]
Pierre Bourgeade s'intéressa également à la calligraphie et la sculpture et il réalisa des expositions.
Pierre Bourgeade, photographe
Dès 1973 dans Zoom, Pierre Bourgeade publie un court extrait de L’Aurore boréale accompagné de photographies prises par lui et qui entretiennent avec le texte d’évidents rapports même si elles n’en sont nullement une illustration immédiate. Afin de conserver à ces documents leur aspect anecdotique et d’en respecter le véritable sens – un bloc-note au service de la fantasmatique, les clichés ont été reproduits d’après les photocopies que Pierre Bourgeade avait communiquées à la revue.
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Il établit un parallèle entre son écriture dense et courte (nouvelles, sonnets, quatrains) et son goût pour des images contrastées, issues de ses photographies photocopiées en noir et blanc, dont les nuances de gris et les valeurs intermédiaires sont gommées, rejoignant par là ses dessins à large traits d’encre.
"Ce que je ne peux pas dire avec les mots, je le photographie"
Pierre Bourgeade
Dans Fantômes & Fantasmes[2], Pierre Bourgeade a réuni des photocopies des photographies. De courtes phrases, instantanés poétiques, "illustrent" ces clichés détournés de l’intimité féminine. Pierre Belfond qui a signé la 4e de couverture de l’ouvrage, précise : « L’auteur ouvre pour nous ses carnets secrets : paysages, croquis, autoportraits… ou, surtout nus féminins. "À bas la beauté !" se serait écrié l’une de ses complices. C’est peut-être vrai, mais il y a, dans la manière – sans précédent semble-t-il – dont Pierre Bourgeade approche le corps de la femme, une grâce sadienne qui n’a rien à envier à ce qu’on appelle la beauté. »
Pierre Bourgeade a déclaré : « J’ai toujours fait beaucoup de photos, la photographie remplaçant pour moi, d’une certaine manière, le journal intime que je n’ai jamais réussi à tenir. Mais il me semble que l'épreuve photographique mate ou brillante, sur son papier glacé, est trop précise comparée à ce qui reste d’une image féminine, dans notre souvenir. C’est pourquoi, tout en conservant précieusement négatifs, épreuves et polaroïds, il m’arrive souvent de les agrandir et de les reproduire en nombre limité par des procédés xérographiques qui donnent à l’image (à l’image érotique, en particulier) le tramé et le grain de la mémoire. J’ai donc accepté avec un grand plaisir la proposition qui m’a été faite par Ornicar de réunir en un album, intitulé Fantômes & Fantasmes une trentaine de ces images. Plutôt que de les accompagner des légendes habituelles, il m’a semblé plus amusant de leur faire illustrer un récit : la découverte, à Londres, du crâne du Marquis de Sade, disparu, on le sait, le jour de son autopsie, le 2 décembre 1814, mais retrouvé depuis par une amie à moi, et resté en ma possession, comme il est raconté dans ce livre. »[3]
Dans Fantômes et fantasmes. J'y ai écrit une nouvelle sur la disparition du crâne du marquis Sade qui court tout au long des photos ou plutôt des photocopies de photos."Autoportraits déformés, oeil de voyeur, dos de femmes, sexes béants..."En couleur, ce cliché serait vulgaire et intolérable. Là, j'ai joué avec le noir et le blanc des photocopies de photocopies. Les photos deviennent abstraites, comme si un travail de la mémoire s'était déjà effectué."[4]
[1] BELFOND (Pierre). Dessins d’écrivains. Paris, Éd. du Chêne, 2003. ISBN 2-84277-489-2
[2] BOURGEADE (Pierre). Fantômes & Fantasmes. Paris, Ornicar, 1999, 66 p. ISBN 2913888-03-8
[3] BOURGEADE (Pierre). « La dédicace de l’auteur », France Inter, 4 avril 2000.
[4] BOURGEADE (Pierre). « Tout contre l’infini ». Propos recueillis par Marie Gauthier. http://www.inventaire-invention.com/lectures/gauthier_bourgeade.htm